J’attends.
On avait dit cinq heures moins le quart.
Il est cinq heures moins le quart, et j’attends.
En fait, au début de l’attente, on ne sait pas qu’on attend.
On est là, comme
prévu, et on a le temps.
Le temps de prendre possession du lieu de rendez-vous.
Un arbre avec un cœur gravé, un abribus avec un tag nerveux,
une fontaine avec des oiseaux, un parvis d’église avec un mendiant, un banc
déjà occupé, un hall de gare avec une immense horloge, un carrefour avec un
petit bonhomme vert…. clignotant.
J’attends et j’ai le temps.
Celui de me remémorer l’histoire de ce rendez-vous.
Ça a commencé au téléphone à mon domicile, ou sur le quai
d’un métro, dans les vestiaires d’un club de gym, lors d’un conseil d’administration,
près de la sortie d’une école maternelle, sous un soleil de plomb, pendant le
discours d’un homme politique, devant un kiosque à journaux… frais.
C’était hier, la semaine passé, le jour de la Toussaint, il
y a un an pile, une éternité…
Et depuis le temps à passé.
Le temps de la vie, le temps de l’ennui, le temps de
l’envie, le temps de la pluie, le temps d’un merci, d’un papillon de nuit, d’un
comique qui se moque de son nez riquiqui, d’une fourmi qui fourmille … d’idées.
J’attends et maintenant, je sais que j’attends, alors
j’approfondis les choses.
L’écorce à commencé à recouvrir le cœur, le tag exprime de
la douleur, les oiseaux se sont envolé, le mendiant a écrit « j’ai
faim » sur un carton, le banc est libre, l’horloge de la gare indique cinq
heure moins le quart passé, le bonhomme vert est devenu rouge… pétant.
L’attente, c’est une solitude qui ne dit pas son nom, une
bougie qui s’évapore à peine, un slogan
révolutionnaire pacifique, un mime qui
parle en dormant, les lumières d’un
bateau dans la nuit… s’approchant.
J’attends et je perds mon temps.
La sève de l’arbre coule au bout de la flèche, un agent de la ville nettoie l’abribus, un chat boit de l’eau à la fontaine, un corbillard
est garé devant l’église, le mendiant a rejoint le banc, on annonce une grève des
cheminots, au carrefour se donne un concert… de klaxons.
Cinq heures moins le quart n’est plus.
Allez, c’est décidé : je file...
On m’attend!!!
" un hall de gare avec une immense horloge " ... ça m'a fait sourire :-)
RépondreSupprimerJ'aime bien en tout cas
Et moi j'attends... notre prochaine rencontre
J'adore ce texte ! La chute est magique ! :-) :-)
RépondreSupprimerAmélie